Jours de Cendre

Marcy, 26 mai 1540...

 

Edmond Cendre, menuisier de son état, a l'heureuse idée de vendre un lopin de terre à Marcy (Nièvre), à une dizaine de kilomètres de Châteauneuf, le 26 mai 1540 (voir l'acte original ou sa transcription). C'est la preuve de la présence des Cendre dans la région dès cette époque.

 

 

C'est à cette même époque, précisément, que la disparition du servage, à Marcy, est attestée. Alentour, on a obtenu depuis longtemps la liberté... Les paysans sont désormais libres de répondre aux appels de main-d'oeuvre émanant des seigneuries voisines. A Corvol-d'Embernard, paroisse limitrophe, on ne s'en prive pas... Un document daté de 1493 révèle que beaucoup d'habitants sont allés vivre ailleurs, laissant leurs maisons vides sans que nul ne vienne les occuper à leur place; le village est menacé de ruine. Les Cendre semblent avoir quitté Marcy autour de 1640. Pourquoi ? Ce qui se passe alors dans la paroisse voisine de Cuncy-les-Varzy n'y est sans doute pas étranger : en 1643, les habitants (de Cuncy) se prétendent tellement ruinés et ravagés tant à cause des gens de guerre que des excessives tailles qu'ils ont la plupart abandonné le lieu, même fait quitter la nuit leurs maisons, crainte que ne fussent emprisonnés pour lesdites tailles et subsistances, desquels il ne s'est fait assemblée il y a plus de quatre ans, les principaux étant contraints de délaisser leurs demeures et qu'ils n'osent tenir des bestiaux et en aller leurs héritages de leurs pontures, étant réduits à mendier.

 

C'est aussi à cette époque que les registres d'état civil font leur apparition : en 1644 à Colméry et en 1659 à Châteauneuf-Val-de-Bargis. Il est donc difficile de remonter plus loin dans le temps.

Cependant, il est un indice qui n'est pas réservé à une caste : c'est le nom de famille, dont l'étymologie, ici, apparaît sans mystère.

Une certitude, tout d'abord : les patronymes Cendre et Cendron sont équivalents. Ils désignent indifféremment un même individu. La première mention, dans les documents d'archives, du nom de Cendron remonte à 1654 (registre de Vielmanay). Mais il pourrait bien avoir été le patronyme familial originel puisqu'on le retrouve dans la dénomination de deux hameaux dont l'existence pourrait remonter à la fin du Moyen Age.

Ce patronyme, en tout cas, permet d'avancer une hypothèse, qui ne cesse de se renforcer au fil de l'avancement des recherches : les premiers porteurs du nom étaient fabricants de cendres.

 

On imagine mal aujourd'hui la place occupée par la forêt dans la vie de nos lointains ancêtres. Rien ne se perd : les branchages, ne pouvant servir au chauffage ou à la menuiserie, sont réduits en cendres et vendus sous cette forme. Pour preuve, cet acte de 1591 mentionnant un certain Jean Sindre (il faut très certainement lire Jean Cendre), cendrier et moleur de bois, demourant en Brinnon, pais de Morvan. Celui-ci s'engage à livrer à un marchand d'Auxerre la quantitté de vingt piedz de cendres.

Au Moyen Age, dans cette région couverte de forêts, ce sont vraisemblablement des familles Cendre qui ont donné leur nom aux hameaux de la Cendreuse et de la Cendronnerie de Saint-Verain (photo ci-dessous) et de la Cendronnerie de Grandchamp (visible sur la carte de Cassini). Saint-Verain-des-Bois (Nièvre) et Granchamp (Yonne) sont deux petites communes situées, respectivement, à trente et soixante kilomètres au nord de Châteauneuf-Val-de-Bargis. Il est à noter qu'elles eurent, un temps, un même seigneur, ainsi, par ailleurs, que Saint-Verain et Châteauneuf-Val-de-Bargis (1525 : Odet de Foix, sire de Lautrec).

On trouve deux autres Cendronneries dans la région, l'une désignant un champ à Colméry, l'autre un bois taillis à Châteauneuf.

 

Concernant Saint-Verain, il est amusant de constater que de nombreux lieux-dits de la région rappellent l'ancienne Judée (souvenir des croisades) : Bethléem, Jéricho, Jérusalem, Nazareth... jusqu'à un cours d'eau : le Cédron, du nom d'un torrent de Judée séparant Jérusalem du mont des Oliviers, célèbre dans la Bible car c'est dans ses eaux qu'on faisait couler le sang des victimes sacrifiées au temple. Jésus, chargé de la croix, le traversa et y fit une chute.

Ce cours d'eau aurait-il pu donner son nom à la Cendronnerie et, au-delà, aux Cendre et Cendron ? L'hypothèse est séduisante mais le fait que ce ruisseau, selon l'historien du pays, ne traverse aucun de ces hameaux la rend peu vraisemblable.

 

Pour être complet, il faut mentionner une autre hypothèse, moins séduisante car elle n'apporte aucune indication biographique : les patronymes Cendre et Cendron viendraient du prénom Alexandre. Cette dernière hypothèse est fondée sur un précédent indiscutable : la commune Le Cendre, en Auvergne, s'appelait Alexandra au XIe siècle...

 

 Moyen Age: le piste belge ?

 Nièvre : autour de 1540

Nièvre : 1650 / 1800

 

Dans le Cher (1800 / 1900)

Dans la région parisienne (1900 / 2000)

Page créée le 1er mars 2007 - Dernière mise à jour le 19 juillet 2011.