Menou, 1722 : Marché pour un transport de bois. (0)

Cote : 3 E 9 / 160 - Minutes du notaire Pierre Gaboreau (Menou)

 

1 - L'an 1722 le treisiesme xbre apres midy par

2 - devant le notaire soussigné sont comparû

3 - en leurs personnes Laurent Rougemont et

4 - Loüis Trotignon (1) le jeune voituriers par terre

5 - demeurant à Menou lesquels solidairement

6 - l'un pour l'autre et un seul pour le tout renonçant

7 - etc ont promy et promettent par ces presentes

8 - à m[aîtr]e Jean Cendre (2) marchand fermier du Vaudoisy, y

9 - demeurant, paroisse de Colméry present stipulant

10 - et aceptant de mener conduire et voiturer de

11 - ce jour d'huy à la st Martin prochaine (3) 1723

12 - la quantité de soixante et dix cordes de bois de

13 - moulle (4) aud[it] Cendre appartenant et qui sont de

14 - present dans les bois de Fourgbas paroisse

15 - de Péroy et de Couloutre ; pour les conduires

16 - mener et voiturer dans led[it] temps de la st Martin

17 - d'hivert prochain sur le port de Corbelin (5) et de

18 - donner le vingt un pour vingt (6) sans faire

19 - aucuns restes des cordes qu'ils commanceront

20 - de charger et deux buches à chaque (orillon)

21 - à la mesure des autres marchands pour et

22 - moyenant le prix de neuf livres par

23 - chacune corde dud[it] bois que led[it] Cencendre

24 - promet payer et s'oblige payer auxd[its] entrepreneurs

25 - toutes fois et quante (7) qu'ils en aurons besoin et

26 - qu'il en sera par eux requis et de leur livrer

27 - port et passages (8) (+ : et led[it] Rougement a reconnu avoir receu contant dud[it] Cendre la somme deux cent trente cinq livres et led[it] Trotignon celle de deux cent soixante et deux livres (9) acompte sur le prix de lad[ite] entreprise) et pour sureté des avances

28 - que led[it] Cendre sera obligé de faire lesd[its] Rougemont

29 - et Trotignon ont obligé afecté et hipotequé tous

30 - et un chacun leurs biens generalement quelconque

31 - et speciallement chacun une paire de boeufs

32 - sous poil blond et rouge avec les charettes et

33 - harnais sans que l'hipoteque general puisse

34 - deroger au special ny le special au general (10);

35 - à tout ce que dessus les parties se sont respectivement

36 - obligées chacune à son egard à peine de tous

37 - depens domages et interest et soit controllé car

38 - ainsy & fait et passé aud[it] Menou les an et

39 - jour que dessus en presence de François et

40 - François Maunoir pere et fils temoins lesquelles

41 - parties ont declaré ne scavoir signer de ce

42 - enquis et interpelé suivant l'ordonnance.

 

F. Maunoir - F. Maunoir - Gaboreau, notaire

 

43 - Controllé à Varzy au volume deux folio vingt six recto article

44 - premier le vingt un decembre 1722. Reçu quatre livres

45 - quatre sols compris les quatre sol pour livre (11). B. Gonat.

 

 Notes et vocabulaire

(0) - Par convention et pour en faciliter la lecture, le texte original a subi diverses retouches : ajout de majuscules, accents, apostrophes et autres signes de ponctuation indispensables à la compréhension ; développement des abréviations ; suppression des majuscules superflues ; séparation des mots accolés... En revanche, l'orthographe n'a pas été corrigée. Les mots entre parenthèses sont incertains.

(1) - Laurent Rougemont et Loüis Trotignon : Voituriers mais aussi laboureurs, ils appartiennent tous les deux à la plus grande et la plus saine partie des habitants de Menou et, à ce titre, participent donc aux assemblées d'habitants.

(2) - Jean Cendre : Né à Menou en 1672, marchand de bois, Jean Cendre est un personnage tout à fait à part au sein de la petite foule des ancêtres Cendre de par sa profession et son statut social ; il est l'un des rares, parmi ceux-ci, qui soit qualifié d'honnorable homme; ce qui signifie, crûment, qu'il a de l'argent... Neuf ans plus tôt, il a d'ailleurs fait un beau mariage avec la fille du lieutenant au bailliage de Colméry, mariage qui a sans doute constitué pour lui une sorte d'aboutissement puisqu'il était alors âgé de 40 ans (sa généalogie).

(3) - à la st Martin prochaine : 11 novembre ; en effet, c'est en novembre que les bûches sont jetées à l'eau ; cette première phase, dite de "flottage à bûches perdues", les conduit jusqu'au "pertuis" (barrage) de la Forêt, près de Clamecy, où attendent les marchands de bois parisiens.

(4) - la quantité de soixante et dix cordes de bois de moulle : La moulée est le bois de chauffage ; on en mesure la quantité à l'aide d'une corde et cette corde devient, par métonymie, une unité de mesure, équivalant à quatre ou cinq stères ; soixante cordes correspondent à la quantité moyenne ordinairement confiée aux voituriers (150 tonnes) ; certains d'entre eux se limitent à 10 ou à 20 cordes ; d'autres vont jusqu'à la centaine. Ici, il s'agit de charroyer 175 tonnes de bois.

(5) - sur le port de Corbelin : Il s'agit d'un "port de jetage", c'est-à-dire de l'endroit d'où seront jetées les bûches à l'eau, ce qui implique certains aménagements : dégagement des berges (pour pouvoir empiler le bois), curage du cours d'eau (pour favoriser le flottage), création de retenues d'eau (pour augmenter, au moment opportun, le débit du cours d'eau)...

(6) - de donner le vingt un pour vingt : Selon Romain Baron, le bois doit être empilé par piles de 9 pieds de longueur et 9 pieds de hauteur contenant chacune deux cordes "busches franches dessus et dessous, au compte de 21 pour 20". Plusieurs auteurs insistent, par ailleurs, sur la dimension des bûches : 1, 14 mètre et pas plus de 15 cm de diamètre !

(7) - toutes fois et quante : Toutes les fois que, autant de fois que.

(8) - port et passages : Sorte de péage.

(9) - soit 497 livres au total, somme importante qui correspond à au moins cinq fois le salaire annuel d'un manoeuvre de l'époque. Rien n'indique le bénéfice escompté par le marchand.

(10) - sans que l’hipoteque general puisse deroger au special ny le special au general : Hypothéque générale est celle qui comprend tous les biens présens & à venir du débiteur, à la différence de l’hypotheque spéciale, qui est limitée à certains biens comme aux biens présens, & non aux biens à venir, ou qui est restrainte à certains biens nommément.

Une des principales différences entre l’hypotheque générale & la spéciale, c’est que la même chose peut être obligée généralement à plusieurs créanciers, au lieu qu’elle ne peut être hypothéquée spécialement qu’à un seul sous peine de stellionat.
L’hypotheque spéciale oblige le créancier de discuter le bien qui lui est ainsi hypothéqué avant de pouvoir s’adresser aux autres ; mais pour prévenir cette difficulté, on a coûtume de stipuler que l’hypotheque générale ne dérogera point à la spéciale, ni la spéciale à la générale. (Encyclopédie Diderot)

(11) - compris les quatre sol pour livre : Imposition spéciale sur les droits d'enregistrement.

  

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Page créée le 31 janvier 2010. Dernière mise à jour le 14 juillet 2011.

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